Une avancée révolutionnaire : Un médicament ralentit la progression de la leucémie en bloquant les gènes responsables du cancer
Des scientifiques luxembourgeois démontrent la valeur thérapeutique d’un composé qui inhibe la traduction des oncogènes
La leucémie, en particulier la LLC, est une forme prévalente de cancer caractérisée par la surproduction et l’accumulation de lymphocytes B dysfonctionnels dans diverses parties du corps. Cette étude s’est concentrée sur l’inhibition de la traduction (c’est-à-dire le processus cellulaire produisant des protéines) des oncogènes, en particulier le gène MYC, dans les cellules de la LLC afin de reconnecter leur métabolisme et de réduire leur capacité à se multiplier rapidement, empêchant ainsi l’évolution de la maladie.
Dirigés par les docteurs Jérôme Paggetti et Etienne Moussay, les chercheurs pionniers du groupe de recherche LIH Tumour Stroma Interactions (TSI) ont mené des recherches approfondies en utilisant des échantillons de patients et des modèles animaux. L’équipe a démontré que la flavagline synthétique FL3, un inducteur connu de la mort des cellules cancéreuses, inhibe efficacement la traduction et la synthèse de protéines associées à des processus cellulaires clés.
L’étude a également révélé que les cellules CLL dérivées de patients présentaient une plus grande sensibilité à la mort induite par le FL3 que les cellules saines. En outre, en inhibant la traduction de MYC, de faibles doses de FL3 ont induit des changements significatifs dans le métabolisme cellulaire, bloquant le cycle cellulaire et entravant la croissance et la prolifération des cellules CLL humaines et animales. Ces résultats fournissent des preuves solides en faveur de l’utilisation d’inhibiteurs de la traduction comme approche thérapeutique sélective pour traiter la LLC.
Les chercheurs ont découvert que le FL3 cible spécifiquement un groupe de protéines appelées prohibitines (PHB), dont ils ont prouvé qu’elles étaient directement impliquées dans la traduction. En perturbant l’interaction entre les PHB et la machinerie de traduction, le médicament FL3 empêche l’initiation de la traduction, interférant efficacement avec le processus et empêchant la croissance des cellules cancéreuses.
Pour valider l’efficacité du FL3 dans le ralentissement de la progression de la LLC, les chercheurs ont mené des expériences in vivo sur des souris. Les résultats ont été stupéfiants : le traitement a permis de réduire considérablement le pourcentage de cellules CLL dans la rate et d’améliorer de manière significative les taux de survie globaux. Il est important de noter que le FL3 a ciblé sélectivement les cellules malignes de la LLC sans affecter les cellules B saines, fournissant ainsi une stratégie prometteuse pour combattre sélectivement les cellules cancéreuses tout en laissant les cellules saines indemnes.
De façon intéressante, lorsque le FL3 a été combiné à une immunothérapie anti-PD1, les résultats ont été encore plus impressionnants, ce qui indique que le FL3 peut également renforcer l’immunité anti-tumorale.
"Notre recherche dévoile une dimension hautement translationnelle dans le domaine du traitement de la LLC. Nous avons découvert qu’une forte expression des gènes liés à l’initiation de la traduction et des gènes PHBs est corrélée à la progression de la maladie, à une faible survie et à des paramètres cliniques défavorables chez les patients atteints de LLC. En inhibant la traduction, nous pouvons potentiellement surmonter la résistance au traitement et offrir une approche prometteuse pour lutter contre les rechutes dans cette maladie maligne difficile," a souligné le Dr Anne Largeot, scientifique seniore au sein du groupe TSI et première auteure de l’étude.
L’étude, intitulée « Inhibition of MYC Translation through Targeting of the Newly Identified PHB-eIF4F Complex as Therapeutic Strategy in CLL« , a non seulement été publiée dans la revue Blood, mais a également fait l’objet d’une page de couverture, soulignant l’importance de cette recherche.